Panier

José et moi sommes partis de France depuis quelques temps déjà. Nous commençons à trouver nos marques dans notre petite camion aménagé, et vadrouillons actuellement à travers les Balkans.

Nous poursuivons notre voyage en Croatie après déjà maintes aventures, et arrivons avec joie à Zadar. Nous attendions de retrouver toute l’âme et la poésie de cette côte maritime féerique avec impatience. Après de traditionnelles errances urbaines, nous prenons la route vers le Sud, afin de longer toute la façade Adriatique croate, réputée pour ses paysages hors du commun.

Fainéanter dans un monde neuf est la plus absorbante des occupations.

Antoine de Saint-Exupéry, Terre des hommes


Dans la vieille ville de Zadar

L’église Saint-Donat, dans la vieille ville de Zadar

En route pour la Dalmatie, et plus précisément pour Šibenik, nous rencontrons un autostoppeur – et ici, ils se font rares – apparemment très éméché. José et moi étant de grands adeptes de l’auto-stop, et nous sachant plus que redevables à la providence, nous le faisons grimper malgré tout. L’homme est jovial, il balbutie quelques mots d’allemand, entre deux « super » qu’il répétera une dizaine de fois. Il semble très ralenti par l’alcool, mais reste d’excellente humeur : ses rires sont contagieux et même s’il nous est impossible de communiquer, une ambiance festive règne dans le van. En partant, il nous laisse une note indiquant ses coordonnées. Je défie Champollion de déchiffrer ses mots, mais relève son honorable intention.

Trogir sera mon grand coup de cœur croate. Avec plus de deux mille ans d’Histoire et de nombreuses influences derrière elle, cette destination touristique a su conserver toute sa part de charme. Un réel moment de plaisir que de parcourir ses ruelles désertes, avant de sombrer dans l’agitation du marché.

Promenade dans Trogir

Promenade dans Trogir

Nous rendant ensuite dans les environs de Split, nous passons la nuit à Jesenice. Le soleil est de retour et pas qu’un peu : c’est avec joie que je dors enfin sans mes vêtements de ski. Depuis octobre et mon road trip en Écosse (mais petite pause durant les fêtes de Noël), je dors sous des températures négatives ou proches de zéro. Mon pyjama ressemble à : un bonnet bleu, une écharpe noire, un débardeur, une polaire à col roulé, un gros sweat-shirt rapiécé, un collant termo-protecteur, un pantalon de jogging gris, et des chaussettes peu assorties à des bas de ski roses. Enveloppez le tout dans une couverture polaire estampillée sweat dreams, dans une couette deux personnes un peu trouée et repliée en deux, puis dans une grosse couverture en laine orange, et laissez-vous guider par votre imagination. L’accoutrement sexy de mes nuits ordinaires, qui est l’un des symptômes les plus sévères de la vie en van… Si avec ça, je ne fais pas des émules… À Jesenice, c’est donc jour de fête : je divise par deux le poids de ma nuisette hivernale.

La route menant à Split fait honneur à sa réputation. La côte escarpée est majestueuse, les îles verdoyantes perdues dans l’Adriatique indénombrables. J’ai même le sentiment d’être en vacances, avant de me rappeler avoir quitté mon emploi, il y a déjà bien longtemps, lorsque je débutais mon tour du monde.

Nous approchons ensuite de la Riviera Makarska, et faisons deux sessions URBEX. Un centre d’accueil pour enfants réfugiés hongrois (immense bâtiment abandonné), ainsi qu’un hôtel luxueux aujourd’hui en ruines. La côte, très marquée par l’industrie touristique, ne compte plus les hôtels abandonnés au temps, alors que de nombreux complexes immobiliers continuent de se construire ça et là. Ici, deux mondes semblent cohabiter : c’est comme gêné que le vétuste s’enfonce sans fin sous les ronces, tandis que le flambant neuf attire de nouveaux vacanciers. J’ai du mal à saisir les tenants et aboutissants de ces constructions qui se multiplient aussi vite que d’autres sombrent dans l’oubli. L’image de carte postale d’une côte magique, et si réputée, commence à en payer le prix fort. C’est finalement sans regrets que nous poursuivons plus au Sud, où certains pans de falaises restent aujourd’hui encore presque vierges.

Le palais de Dioclétien, dans la vieille ville de Split

Le palais de Dioclétien, dans la vieille ville de Split

À Drašnice, petit village situé en bord de mer, nous dormons près du port de pêche, sous les regards médusés des quelques riverains. L’une des nuits les plus calmes que nous ayons connues, et ce sentiment de plénitude l’aurait presque emporté sur notre envie de croquer à nouveau l’asphalte le lendemain.

Nous ne le savions pas, mais la côte croate est entrecoupée par une petite partie de Bosnie-Herzégovine, pays voisin, permettant à ce dernier de bénéficier d’un accès direct sur la façade maritime. Souhaitant nous rendre à Dubrovnik, nous devons donc passer deux postes frontaliers. La douane bosniaque nous accueille avec joie, alors que côté croate, nous avons droit à une traditionnelle fouille du van aménagé, ce qui commençait à nous manquer. L’homme semble plus aguerri que tous ses précédents acolytes, et si nous étions encore jeunes et fougueux nous n’aurions pas manqué de le féliciter pour son professionnalisme, son dévouement et sa perspicacité. Mais une fois encore, nous sommes désolés de lui apprendre que non, même dans notre boite de cappuccino, ni dans notre sac poubelle ou encore entre nos deux jambes, nous ne transportons pas de drogue. Si nous étions réellement empathiques, nous serions presque déçus pour lui. C’est ainsi que nous franchissons Neum et regagnons la Croatie.

Nous traversons la Vallée de la Vie, où nous admirons les plus beaux paysages que nous ayons rencontrés jusqu’alors, et ce dans tout le pays. Les lacs turquoises fourmillent de part et d’autres de la route toujours plus sinueuse, et de grands éclats de voix réveillent soudain l’intérieur de l’habitacle : « Arrête-toi! Vas-y sors la caméra! » En joyeux touristes – que nous sommes tous, quoi que nous puissions lire sur le net – nous en prenons plein les yeux et immortalisons l’instant comme il se doit : une photo pour Maman, une photo pour Papa, et une photo pour Papi, avant de reprendre notre chemin.

Les lacs de la Vallée de la Vie

Les incroyables couleurs de la Vallée de la Vie

Un peu plus loin, la concurrence fait rage entre vendeurs de fruits. Les boutiques ne se comptent plus et illuminent le bord de la chaussée d’un orange vif, qui marque notre venue dans un nouveau monde. C’est comme hors du temps que nous entrons alors dans Dubrovnik. Comme tous les groupes de touristes qui précèdent nos pas, nous découvrons Stari Grad (la vieille ville) à la queue-leu-leu, de nos yeux encore vierges. Les vacanciers ne sont pas fous, tous vont là où les merveilles se trouvent. Alors, pour échapper à ce flux humain incessant qui nous aspire ne seraient-ce que quelques minutes, nous achetons à manger à la volée, et prenons place sur un escalier isolé semblant n’attendre que nous. Nous tentons d’arracher à la ville un instant volé. C’est loupé : sandwich dégueu, avalé d’une traite sous les yeux hagards d’un pigeon estropié qui nous fait de l’œil. « On bouge? On bouge. »

Ayant atteint la pointe Sud de la Croatie, nous arrivons en Bosnie-Herzégovine. Qui dit nouveau pays dit nouveau franchissement de frontière, mais cette fois le douanier est plutôt débonnaire. À José, il demande : « You driver? You big boss? » Quant à moi, il se contente de : « You cooking??? »

« Ouais mec, et je lave aussi les slips de mon coloc’ tiens, ça me fait kiffer. » Ça, c’était dans ma tête, en fait je lui réponds : « euh, oui oui, un peu… » Et il lève manuellement sa barrière en bois bariolée, nous débutons notre voyage en Bosnie-Herzégovine

Enfin, pour en savoir plus, n’hésitez pas à retrouver mes autres récits de voyage, ainsi que des réflexions plus personnelles liées à ma vie nomade!

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